Par Boubacar Sylla
Et si la radio que nous écoutons, était totalement produite par des robots ? Sans journalistes. Cette radio existe déjà aux Etats-Unis et s’appelle RadioGPT, elle est produite de bout en bout par des entrelacs de neurones artificiels.
L’efflorescence de l’intelligence artificielle (AI) à la portée de tous, ChatGPT ou Sydney et autres, oigne des électrochocs en série dans toutes les professions et tout particulièrement au sein des médias. Il y a eu un premier grand coup de semonce avec l’annonce par le groupe Axel Springer du remplacement éventuel d’une partie de ses 3’400 journalistes par ChatGPT. Puis le licenciement, aux États-Unis, de rédacteurs du site d’information CNET au bénéfice du générateur de texte. Et le mouvement n’est pas près de s’arrêter, y compris au sein des maisons de presse dans d’autres pays. L’IA ne doit cependant pas être vue comme une menace pour le travail du journaliste, qui reste essentiel. Car si ChatGPT est capable de livrer des informations souvent cohérentes, cela ne signifie pas qu’elles soient toujours forcément fiables. Ses algorithmes ont été sélectionnés pour imiter la manière dont les humains interagissent et non pas pour générer un texte factuellement correct. Faites le test vous-même.
Un essor phénoménal
Cent millions d’usagers ont déjà essayé ce nouveau modèle de langage, capable de produire des textes et les bouleversements qui se préviennent toucheront la plupart des professions : avocats, poètes, romanciers, musiciens, dessinateurs, ingénieurs… Le monde des médias s’y préparait de longue date, sans que le grand public n’y tienne garde. En 2020 déjà, « the Guardian » déballait ses colonnes à GPT-3, développé par la société californienne OpenAI, qui compte Elon Musk parmi ses co-fondateurs. Le journal demandait alors à son « rédacteur » d’un nouveau type, d’écrire un texte court de 500 mots sur la thématique suivante : « Pourquoi les humains n’ont rien à craindre des machines ». Plus avant encore, aux JO 2016 de Rio, le « Washington Post » embarquait un robot-reporter baptisé Heliograf, pour couvrir la compétition et faire le recensement des scores, classements et statistiques diverses.
Les algorithmes d’écriture instinctive s’accroissent aujourd’hui et l’Internet est inondé d’informations financières ou de résultats sportifs, écrits sans le concours de journalises. En Suisse même, le groupe Tamedia a automatisé la rédaction de brèves sur les résultats d’élections dans les communes. L’intérêt de ces androïdes est clair : Ils permettent des économies d’emplois, pour toute une série d’articles qui comptent des datas existants.
Faut-il s’inquiéter ?
L’alguazil conversationnel développé par OpenAI va-t-il remplacer l’humain ? Faut-il s’en alarmer ? Si on le lui demande, ChatGPt lui-même répond à la question de la manière suivante : « En tant qu’AI qui fournit des informations, je ne suis pas conçue pour remplacer les journalistes ou tout autre profession…les compétences et l’expérience humaine sont toujours nécessaire pour produire un journalisme de qualité, éthique et impartial. »
On le voit chaque jour plus clairement, les Chatbots offrent aux journalistes – comme aux très nombreuses autres professions concernées – un formidable pylône. Leur force de calcul phénoménale ne remplacera pas l’humain, qui lui est capable de développer et de contrôler. « L’intelligence humaine ne se contente pas de définir ce qui est ou ce qui pourrait être. Elle cherche à établir ce qui doit être », résume délicatement le linguiste américain Noam Chomsky.
Les rédactions sénégalaises vont-elles s’adapter à ce nouveau paysage ?
Ne serait-il pas utile d’anticiper sur une prescription de cet épiphénomène qui bouleversera sans aucun doute le monde ?