Le mentorat, moyen organique de transmission durable

Né à Dakar, Babacar Sy avait deux ans lorsque ses parents se sont installés en France. À 20 ans, alors qu’il était étudiant et basketteur, sa sœur de deux ans son aînée décède tragiquement. Elle laisse derrière elle un projet sociologique qui visait à créer un système de mentorat entre les agriculteurs âgés et les plus jeunes, en Afrique, afin de favoriser la transmission des savoirs. Engagé à poursuivre l’ambition de sa sœur, Babacar Sy s’empare de l’idée et l’adapte à sa passion : le basketball. Il crée en 1995 Giving Back, une association dont la devise le suit toujours aujourd’hui : « n’oublie jamais d’où tu viens ».

Fondé en 1995, Giving Back est un écosystème durable basé sur l’éducation des jeunes sportifs et leur transformation en leaders sociaux. « En leur donnant accès à l’éducation, nous leur transmettons les clés pour devenir de véritables leaders sociaux et endosser les responsabilités sociétales qui leur reviennent, envers leurs communautés », explique l’entrepreneur. En clair, Giving Back a aidé jusqu’en 2017 des jeunes d’Europe et d’Afrique à obtenir des bourses scolaires et sportives aux États-Unis, et passe avec ses bénéficiaires un contrat moral fidèle aux valeurs du slogan « n’oublie jamais d’où tu viens ». Les jeunes basketteurs s’engagent à revenir au sein de l’association pour transmettre leur expérience, et financer les nouvelles générations. Intrigués par le système durable du mouvement Giving Back, Google l’invite en 2018 au Google Talk à la Silicon Valley, puis à Paris, pour exposer ses mécanismes sociaux et économiques.

Des bourses d’études pour des centaines d’athlètes internationaux

Pendant plus de vingt ans et sans aucun financement public, Babacar Sy réussit à construire un réseau d’universités et de lycées américains, collecte des fonds, met en place des bourses et permet à des centaines de jeunes Africains de se faire repérer par les professionnels du basket. En 2015, 70 % des participants au programme avaient obtenu un diplôme universitaire, 70 % étaient devenus sportifs professionnels, et 90 % sont désormais ambassadeurs de l’association. En 2000, Giving Back fonde des académies de sport-études au Sénégal et au Mali afin de pérenniser son action auprès des jeunes.

En parallèle, Babacar Sy devient évaluateur international (scout) en NBA, pour des équipes comme les Houston Rockets, les Memphis Grizzlies et les Utah Jazz. Il devient également entraîneur dans un lycée et une université aux USA, leur permettant de se hisser parmi les meilleurs programmes nationaux avec de futurs ambassadeurs Giving Back, tels que Nikola Vucevic, devenu joueur star en NBA, et Hamady Ndiaye, drafté en 2010 aux États-Unis. Grâce à ces expériences, Adidas fait appel à lui pour diriger son programme de détection des talents Adidas Nations. Il repère et entraîne de futurs grands talents du basket international et de la NBA, comme les Congolais Serge Ibaka et Emmanuel Mudiay, le Suisse Clint Capela, et les Français Guerschon Yabusele et Amath Mbaye, le Soudanais Wenyen Gabriel, ou encore le Guinéen Hamidou Diallo. La plupart, encore méconnus à l’époque, ont connu une grande carrière depuis, et certains se sont beaucoup investis dans les actions sociales de Babacar Sy.

Le développement social et durable au cœur de chaque projet

Babacar Sy poursuit son parcours entrepreneurial en sortant du cadre du sport. Il crée au Sénégal l’agence grow, dédiée au développement et à la gestion de projets institutionnels, privés et sociaux, qui dédie 50 % de son activité au développement d’entreprises sociales. Il duplique ensuite le modèle de Giving Back sur un autre sujet qui tenait particulièrement à cœur à sa sœur : l’éducation des jeunes femmes. En 2018, et notamment grâce aux ambassadeurs sportifs Giving Back, Babacar Sy fonde la grow academy, un programme d’entrepreneuriat social pour les jeunes femmes déscolarisées. En 2021, la grow academy devient une startup technologique de formation et d’insertion professionnelle, dont l’innovation repose sur un format de formation hybride et en alternance, ainsi qu’une stratégie de proximité pour la réduction du dernier kilomètre. On y dispense des ateliers de soft skills, des cours de programmation informatique, de production de contenus audiovisuels, de marketing digital et de business. Le tout en langues Wolof et locales, et en majorité en ligne, grâce à une application e-learning qui permet d’assurer une meilleure accessibilité à toutes. Les apprenantes sont également en alternance dans des micro-entreprises gérées par des femmes près de chez elles. Depuis mai 2022, presque 400 apprenantes sont formées par la grow academy, qui vient de signer un partenariat public-privé avec le Grand-Duché de Luxembourg dans le cadre de sa coopération avec le ministère de la Formation Professionnelle du Sénégal (MFPAI). D’ici 2023, la grow academy pourra ainsi en accueillir mille au total.

Auteur depuis ses plus jeunes années, Babacar Sy s’investit ces 3 dernières années dans la production cinématographique, notamment auprès de la productrice Paméla Diop pour la stratégie du film Saloum, sélectionné au Festival International de Toronto. Les deux associés viennent tout juste de créer la société Biopics Films, qui produira des films biographiques cinématographiques sur les légendes africaines du sport.

Il crée en 2021 l’association humanitaire Never Forget Where You Come From, qui poursuit l’engagement premier de Giving Back, en mettant en place des actions solidaires à 1 million de dollars dans les domaines de l’éducation, la santé et la culture, en Afrique et partout dans le monde.

Babacar Sy considère comme son devoir de servir des écosystèmes sociaux circulaires en Afrique, afin de créer des communautés engagées avec un impact sociétal local.

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Par Ola sn (avec Forbes)