Deux ans après l’entrée en vigueur de la loi n°2020-04 du 08 janvier 2020 portant sur « la prévention et la réduction de l’incidence des produits plastiques sur l’environnement » force est de constater que les résultats sont maigres.
Malgré la disparition de quelques produits plastiques dans les grandes surfaces, l’interdiction officielle de l’entrée des sachets au niveau de nos frontières, terrestre, maritime et aérienne, malgré le caractère ambitieux de la loi et le durcissement de certaines dispositions, « l’ultime espoir de débarrasser le Sénégal de ce fléau lié au péril plastique s’amenuise et reste une chimère pour bon nombre de citoyens et d’observateurs. », a fait remarquer un parti écologiste sénégalais qui liste les manquements sur lesquels « nous pouvons pointer du doigt ». Il est question notamment d’un manque d’appropriation de la loi par les citoyens ;
Une approche communicationnelle laborieuse, d’une insuffisance des produits alternatifs sur le marché, d’une absence de textes d’application devant permettre l’opérationnalisation de certaines dispositions de la loi, d’un manque de préparation dans l’élaboration de la loi quant à l’implication de toutes les parties prenantes concernées, d’un dialogue de sourd entre les promoteurs industriels évoluant dans la production des sachets d’eau en plastique et les autorités étatiques concernées, regrette l’Alliance des Ecologistes du Sénégal (ADES).
A cette liste, s’ajoute un développement de filière d’unités de production clandestine, une absence de dispositifs d’anticipation dans la mise au marché des produits alternatifs, une absence de politique globale d’accompagnement des PME et PMI, évoluant dans le secteur de la production des sachets d’eau en plastique, d’aller vers la reconversion des produits alternatifs, une absence de mesures d’incitation des entreprises à s’investir dans la production et la vente de produits alternatifs, d’un soupçon d’entrée frauduleuse des sachets plastiques sur le territoire national.
Ce n’est pas tout puisque les écologistes dénoncent un abus dans l’utilisation des sachets plastiques chez les citoyens, accompagné d’un problème de changement de comportement, d’un manque de moyen des agents de contrôle chargés de l’exécution de la loi sur le terrain, surtout au niveau des régions et d’une absence de dispositif allant de tri à la base et la réduction du jetable.
Selon les dernières estimations de l’OCDE, la production de plastique a explosé dans le monde, passant de 2 millions de tonnes en 1950 à 460 millions de tonnes en 2019 générant 353 millions de tonnes de déchets dont moins de 10% sont actuellement recyclées et 22% sont abandonnées dans des décharges sauvages, brûlées à ciel ouvert ou rejetées dans l’environnement. Selon les chiffres de l’ONU, avec quelques 11 millions de tonnes de déchets plastiques qui se déversent chaque année dans les océans, plus de 800 espèces marines et côtières sont affectées par ingestion, enchevêtrement et autres dangers.
Au Sénégal, c’est à peu près plus de 193 000 tonnes de déchets plastiques qui sont produites, chaque année, dont seulement 8000 tonnes recyclées. Pour la seule région de Dakar, l’estimation du potentiel de déchets plastiques, sur la base d’une quantité de production journalière de 1 500 tonnes de déchets solides urbains, se chiffre à 99 700 tonnes par an, dont 78% représentent des emballages plastiques. Pour corriger les manquements l’Ades invite l’Etat à faire une évaluation exhaustive de l’efficacité de la loi plastique après deux années de mise en œuvre et à corriger les manquements, d’asseoir les bases d’un dialogue sincère, constructif et fructueux avec toutes les parties prenantes, accompagner, à travers, une politique globale multisectorielle, et, des mesures incitatives, les PME et PMI, évoluant dans le secteur des sachets d’eau en plastique, dans la reconversion de solutions et de produits alternatifs et travailler avec le secteur privé à développer une véritable industrie de valorisation des déchets plastiques.